La situation au Nord, les pourparlers d’Alger, l’accord de défense avec la France et le foncier, sont les principaux sujets qui ont dominé les échanges avec la population Le Premier ministre, Moussa Mara, a bouclé hier la tournée qu’il avait entamée mercredi dans la Région de Kayes. Après Nioro du Sahel (L’Essor de vendredi), la ville de Kayes a constitué la deuxième étape de ce périple.
Dans « la capitale des rails », la journée du vendredi fut bien chargée pour le chef du gouvernement. Le ton fut donné dès son arrivée par une rencontre avec les autorités administratives, les élus locaux et les notabilités de la ville de Kayes. La réunion s’est déroulée dans les locaux du Conseil de cercle. Expliquant le sens de sa visite à ses interlocuteurs, Moussa Mara dira : « Je suis venu chez vous pour m’entretenir avec vous. Nous ne sommes nullement venus pour faire le procès qu’on veille intenter à qui que ce soi.
Seulement, il est nécessaire que l’on se rencontre pour parler des défis auxquels les populations confrontées ». Après ce briefing, tout le monde s’est retrouvé quelques minutes plus tard dans la salle de conférence du gouvernorat. Comme à Nioro du Sahel, aucun sujet concernant la vie de la Nation ne fut occultée. Le chef du gouvernement a eu des échanges ouverts et directs avec la population. « Nous sommes venus vous parler, vous écouter pour qu’enfin nous puissions connaître les préoccupations des uns et des autres. Il n’y aura pas de restriction dans la parole. Tous les sujets seront abordés ici. Car nous sommes là pour se dire la vérité », a énoncé le chef du gouvernement. Le ton était ainsi donné. Moussa Mara a ensuite exposé les orientations politiques données au gouvernement par le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita. Ces orientations contenues dans le projet de société du président de la République, se déclinent en six chapitres pour que le Mali retrouve son rang de grande nation. DES SACRIFICES A CONSENTIR. Les six axes définis par le chef de l’Etat prennent en charge les priorités parmi les priorités. La situation de la crise a encore amplifié l’urgence à laquelle fait face notre pays, a souligné Moussa Mara.
Aujourd’hui, les Maliens ont besoin d’un Etat fort. Et cela n’est possible que lorsqu’il existe des institutions fortes. Ibrahim Boubacar Keïta a fait du renforcement des symboles de la République son premier chantier. La sécurité fait également partie des priorités des priorités comme en témoigne la situation actuelle au Nord. Et le chef du gouvernement de souligner le lien indissociable entre la sécurité et le développement socioéconomique. Ces deux premiers chapitres vont de paire également avec d’autres défis : la réconciliation nationale, l’éducation, la croissance économique et enfin le développement social et la solidarité. Tous ces chapitres constituent des chantiers qu’il faut à tout prix mener à bien pour que le pays devienne ce que les Maliens aspirent qu’il soit. Moussa Mara a indiqué que la bonne exécution de ce projet de société reste tributaire à la résolution de la crise au nord. De son point de vue, cet objectif reste à la portée des Maliens. Mais il va falloir consentir des sacrifices. Le chemin à suivre pour sortir définitivement le pays de l’impasse passe par les pourparlers avec les groupes rebelles et l’ensemble des communautés du Nord. C’est aussi cet esprit de dialogue et de confiance qui sous-tend la signature de l’accord de coopération et de défense entre notre pays et la France. Le Premier ministre expliqué que la signature de cet accord avec la France n’est pas quelque chose d’inédit. Il existait déjà un accord de coopération militaire entre les deux pays depuis 1985. Moussa Mara a indiqué que cet accord tient à deux motivations. Il s’agissait d’une part de réactualiser les relations de coopération militaire vielles d’une trentaine d’années et d’autre part trouver un cadre de gestion à la présence des troupes françaises sur le territoire national. En effet, après l’opération « Serval » qui a permis de chasser les obscurantistes hors du pays, le territoire national abrite encore quelques milliers de soldats français dans le cadre de l’opération « Barkhane » qui a pris le relai de « Serval ». La question du foncier est également revenue dans les interventions au cours de la rencontre.
Pour le Premier ministre, le foncier a pris des proportions dramatiques dans notre pays ces dernières années. Ce la est dû en partie à l’interprétation biaisée des textes qui régissent le domaine, et aussi et à la multiplicité des acteurs qui interviennent dans le secteur. Aujourd’hui la terre est devenue un enjeu économique. Elle attise toutes les convoitises, cristallise les tensions. Tous (autorités administratives, élus communaux, chefs coutumiers) sont devenus des vendeurs de terrains. Des mesures appropriées sont en cours pour que cessent les dérives, a assuré le chef du gouvernement, annonçant qu’un comité interministériel a été mise en place et veillera à l’application stricte des textes régissant le domaine foncier. Sur la question du foncier, le ministre de la Justice et des Droits de l’homme Mohamed Ali Bathily qui a dû personnellement intervenir récemment dans la gestion de certaines affaires foncières, a fait une intervention fort remarquée. En effet, il n’a pas pris de gants pour dénoncer la corruption qui mine la gestion du foncier. Il a même assuré détenir des preuves contre certaines personnes tapies dans les tribunaux. « Il y a des gens qui en ont fait leur gagne-pain. Nous en connaissons des gens qui collectent de l’argent auprès de Maliens de l’extérieur prétendant soudoyer les juges pour qu’un litige foncier soit tranché en leur faveur. Il y a des gens qui ne reculent devant rien. Ils n’ont peur de rien et n’ont aucun respect pour l’appareil judiciaire. Ceux-là, nous les combattrons avec la plus grande détermination. Aussi bien les spéculateurs que les juges et autres procureurs qui se seraient rendus leurs complices. Nous les poursuivrons où qu’ils aillent », a martelé Mohamed Ali Bathily, sous les applaudissements nourris de la salle. Les échanges entre le Premier ministre et l’auditoire ont permis de recenser quelques grandes préoccupations des populations des cercles de Kayes et Yélimané. Elles sont relatives, entre autres, au bitumage de la route Kayes-Bafoulabé, à la subvention des intrants agricoles, au renforcement du dispositif sécuritaire dans les différentes localités, à la question de l’énergie, à l’emploi des jeunes etc… C’est par le cercle de Kita que le périple du chef du gouvernement a pris fin hier. Nous y reviendrons dans notre prochaine édition. Envoyé spécial L. DIARRA —
SUR LE CHANTIER DE L’AEROPORT ET A LA POSTE… La tournée du Premier ministre, Moussa Mara dans la Région de Kayes ne s’est pas limitée aux rencontres avec les populations. La visite était également placée sous le signe du développement local. C’est ainsi que le visiteur de marque s’est rendu sur le chantier du dépôt de kérosène en construction à l’aéroport « Dag-Dag » et dans les locaux de la poste où il a pris connaissance du programme E-Poste. Le projet de renforcement de l’aéroport de «Dag-Dag » de Kayes porte sur la fourniture d’un camion ravitailleur d’une capacité de 18 000 litres, la fourniture et l’installation de deux bacs de stockage atmosphériques d’une capacité utile de 100 m3 chacun, l’installation et la mise en service des systèmes électriques et téléphoniques, d’eau, de lutte anti-incendie.
Enfin, le projet englobe la construction des voies de circulation et la construction d’un bâtiment administratif et d’installations connexes. Le coût global de la réalisation est estimé à 2,858 milliards de Fcfa. La construction des ouvrages a été confiée au Groupement d’entreprises Builders Diawra Solar/MAC pour un montant de 2,822 milliards de Fcfa et un délai d’exécution de 12 mois. Le financement du projet est assuré par le budget national sur les exercices 2013, 2014 et 2015. La surveillance et le contrôle des travaux sont confiés au Groupement SID/SERTAS pour un montant de 52,5 millions de Fcfa, avec un délai d’exécution de 13 mois, sur financement du budget de l’Agence nationale de l’aviation civile (ANAC). A la poste, Moussa Mara et sa délégation ont visité les nouvelles installations réalisées dans le cadre du programme E-Poste. Ce programme vise à renforcer le système de communication numérique entre les services de l’administration. Le E-Poste permet non seulement d’appuyer la poste dans sa mission originelle en tant vecteur d’échanges, de désenclavement, de rapprochement des hommes, mais aussi d’accéder à l’autoroute de l’information. Il constitue également une opportunité pour la poste de bénéficier d’une très large autonomie en matière de communication interne et externe à travers l’usage de la téléphonie IP.
Le Premier ministre a fait part de son inquiétude par rapport à l’évolution des travaux du dépôt de kérosène qui affichent aujourd’hui un taux d’exécution de 19,6% pour un délai consommé de 76,44%. Ce retard dans l’exécution des travaux est dû aux difficultés dans le décaissement des fonds, ont expliqué les responsables de l’entreprise. Le chef du gouvernement a promis de s’investir personnellement pour que l’ouvrage soit prêt dans un an. Il a souligné l’importance de l’aéroport sur l’économie de la Région de Kayes. « Kayes est une région d’émigration. En renforçant les installations, l’aéroport pourra jouer pleinement son rôle de trait d’union entre notre pays et la France. La réalisation permettra de rehausser le niveau de trafic aérien et des avions de ligne de toutes catégories pourront atterrir ici, facilitant le déplacement de nos ressortissants et également le transport de nos produits agricoles vers l’Europe », a-t-il souligné. Notant que l’un des défis majeurs auxquels sont confrontés la sous-région en général et notre pays en particulier, est la fracture numérique, le Premier ministre a évoqué la situation de la poste qui fait face aux défis des nouvelles technologies de l’information. « Il va falloir qu’elle colle au train de l’évolution. Cela y va de sa survie », a dit Moussa Mara, avant d’encourager les responsables à persévérer dans les efforts pour préserver et moderniser cet outil.
L. D.
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