Ce qui s’est passé à Gao est le pire attentat terroriste de l’histoire de notre pays. Il nous a plongés dans un deuil légitime mais aussi créé un désarroi perceptible parmi les Maliens. Nous sommes tous derrière les victimes et leurs familles et chacun se recueille à sa manière pour traduire sa compassion. Nos dirigeants se sont mobilisés pour concrétiser le soutien de la nation à nos Forces armées maliennes (FAMA). Cette mobilisation exceptionnelle a touché la classe politique qui, malgré ses antagonismes, a affiché son unité et son engagement unanime auprès de nos autorités et des victimes de cet acte ignoble.
Après le deuil, la vie continue mais nous devons dépasser nos douleurs et le choc et appréhender cet évènement à sa dimension. Cela nous aidera à mieux nous préparer face aux défis de l’avenir.
Le premier réflexe à avoir est de répondre sérieusement à la question du comment ? Il faut qu’on puisse savoir comment le véhicule des terroristes a pu franchir les portes du camp du mécanisme opérationnel de coordination (MOC), dans une ville en état de siège comme Gao et arriver opportunément à proximité de soldats en regroupement ? Le timing est trop parfait pour être hasardeux. Les complicités éventuelles doivent être établies et surtout des leçons pertinentes doivent être tirées pour que des situations de ce genre ne puissent se renouveler.
Nous devons surtout intégrer que des actes terroristes viseront de plus en plus nos troupes, et même les simples citoyens maliens et nous départir définitivement de l’opinion que ces barbares ne visent que les étrangers. Cela est prévisible à tout moment, pour plusieurs raisons dont la principale est en lien avec le processus de paix. Les terroristes ne vont pas s’arrêter. Chaque fois que nous ferons des progrès vers la paix, ils se sentiront fragilisés et nous attaqueront.
Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors des débats autour de la Déclaration de Politique Générale en avril 2014, le Mali fait face à trois types de menaces au Nord que sont, par ordre croissant, la rébellion avec ses incidences sur l’intégrité du territoire national, le terrorisme et enfin les trafics dont celui de la drogue. Sans le traitement de la rébellion, il n’est pas possible de réussir contre le terrorisme et le trafic de drogue. Les terroristes et les trafiquants le savent, c’est pourquoi ils feront tout pour nous en empêcher, c’est ce qu’il faut comprendre de la barbarie de Gao.
Paradoxalement, plus nous essuierons des tentatives ou des actes de ce type, plus nous devons nous dire que nous sommes sur le bon chemin et donc nous adosser à cela pour accélérer encore le pas. Aux autorités de nous entrainer tous dans ce mouvement !
Il faut mobiliser les Maliens et les conditionner à intégrer désormais les attentats comme une donne avec laquelle il faut vivre, et cela partout sur le territoire y compris surtout à Bamako. Il est probable que notre capitale et nos grandes villes soient visées avec pour objectif de faire des victimes en très grand nombre comme en Afghanistan ou au Nigeria, quand nous nous approcherons de nos buts, notamment en cas de progrès contre le terrorisme ou contre le trafic de drogue.
Nous devons savoir que plus rien ne sera comme avant, c’est le cas en France comme en Chine ou au Niger. C’est le cas chez nous aussi. Nous devons enfin l’intégrer comme nous devons retenir que la lutte prendra du temps et beaucoup de temps. Il est quasiment certain qu’à Bamako ou ailleurs, des cellules dormantes terroristes soient entrain de se préparer. Il est tout aussi certain que les trafiquants et terroristes disposent de complices ou d’obligés au sein de nos forces de sécurité, de nos administrations et, peut-être, de nos Institutions. Ne soyons pas naïfs, intégrons ces donnes !
Cela nous aidera à mobiliser, cela nous aidera à préparer les esprits et à organiser efficacement la riposte. Celle-ci doit concerner l’ensemble de nos ressources sécuritaires mais aussi et surtout nos services de renseignement. Elle doit porter aussi sur le conditionnement indispensable de notre administration, nos fonctionnaires territoriaux, des élus locaux, des autorités traditionnelles et religieuses et l’ensemble des forces vives du pays à contribuer à cette guerre d’un nouveau genre. Il appartient aux autorités maliennes de se hisser à la hauteur de la menace et à entrainer enfin le pays à faire face à ce qui apparaît clairement comme un défi existentiel.
Moussa MARA
www.moussamara.com24
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